4ème dimanche de carême, année B

2Ch 36.14-16,19-23
Ps 136.1-6
Eph 2.4-10
Jn 3.14-21

Nous venons d’écouter le discours qui suit la question de Nicodème. Comment un homme vieux peut-il accéder à vivre une vie nouvelle ? Comment pouvons-nous dépasser nos préjugés après une vie qui nous a souvent donné raison ? Comment pouvons-nous vivre encore des jours lumineux, des horizons d’espérance ? N’est-ce pas une illusion de prêcher la paix et la joie dans le monde convulsé où nous vivons ?

La réponse est donnée par une image et par une réflexion. L’image remémore le passage des hébreux par le désert, terre aride où le peuple se sent tiraillé entre le retour aux choses connus, l’Égypte ou l’horizon nouveau que chaque jour semble éloigner. Tout le monde en est blessé. Le texte du livre des Nombres nous parle de serpents brûlants qui mordent. C’est ainsi que nous sommes blessés, les réalités de la terre nous mordent, nous font souffrir. Le remède est regarder en haut la même réalité qui nous fait souffrir. Il faut renverser notre appréciation des choses. Le Carême emploie le mot conversion, changement de notre regard. C’est ainsi que nous, les chrétiens, avons transformé notre regard sur la croix ; nous ne voyons pas en elle l’instrument de condamnation d’un bandit, mais la source de notre salut, de notre guérison.

La réflexion alors nous fait comprendre qu’il n’y a pas de condamnation pour l’homme de la part de Dieu, mais un amour si fort qu'il nous donne son Fils bien aimé. Si condamnation il y a, celle-ci vient de la part de l’homme quand nous préférons les ténèbres à la lumière. Nous le voyons souvent : nous avons préféré le mensonge sur les armes en Irak et nous pouvons constater dans la douleur la condamnation d'innocents à la souffrance. Nous avons préféré le plaisir immédiat et aigu et nous pouvons constater dans la douleur la condamnation à la drogue de tant de jeunes gens. Nous avons préféré un système de profit sans mesure et nous constatons étonnés la condamnation à la crispation de notre société.

Mais le texte ne finit pas dans le désespoir, car il constate qu’il y a des gens qui agissent selon la vérité et ainsi ils viennent à la lumière. Ces œuvres, alors, sont reconnues comme signes de la présence de Dieu parmi nous. Ces œuvres sont des gestes de guérison pour les hommes et des femmes accablés, pour des enfants abandonnés. Ce sont la continuation des gestes de tendresse et de piété de Jésus, car le but de Dieu étant le salut des hommes, tout ce qui s’oriente ainsi porte leur pas vers la vérité de Dieu.

L’histoire peut être pénible comme la première lecture nous le montre. Le livre des Chroniques royales d’Israël nous raconte les déceptions et les malheurs de l’histoire, mais il finit par un chant d’espérance. Même si l’horizon s’éloigne, le jour viendra où la vérité de l’homme et de Dieu sera reconnue. Il y aura alors une alliance nouvelle. Saint Paul le dit d’une manière forte : Dieu nous a fait revivre avec le Christ ; c’est bien par grâce que vous êtes sauvés. Avec lui, il nous a ressuscités ; avec lui, il nous a fait régner aux cieux, dans le Christ Jésus.

Comment un homme vieux peut-il retrouver une nouvelle vie ? Il ne faut pas pour cela retourner au sein de sa mère comme déjà Nicodème en faisait la critique. Non, c’est bien suffisant suivre Jésus, l’homme d’une humanité toute neuve qui s’identifie avec le Dieu qui vient à nous. Trouver Dieu en Jésus et Jésus en Dieu, voilà les mystères que nos vies pleines de préjugés nous enlèvent. Ces préjugés nous font regarder toujours en bas, vers les serpents brûlants qui nous mordent. Nous pensons alors qu’il n’y a pas de sortie, que le monde est carré et fermé, que seuls les puissants de ce monde ont des solutions, que ce sont les autres qui ont des responsabilités, mais que finalement rien n'est bon, que l’homme est condamné.

Je vous demande de vous insurger contre ce monde du désespoir, ce monde plat. Viens à moi, dit Jésus à Nicodème. Viens à cette marche vers l’horizon où il y a la guérison définitive de l’homme. Viens, car en marchant tu y es déjà. Seul l’amour peut te dire en quoi aujourd’hui tu peux imiter ma manière de vivre traversant toute mort. Viens à moi, nous dit Jésus, à cette heure où nous le retrouvons dans la mémoire de notre communauté, dans le geste de se livrer toute sa personne pour le salut, pour vous et pour la multitude. Viens à moi, prend mon joug si léger, abandonne tes préjugés et tes désillusions ; viens à ma connaissance ; viens au partage de ma passion pour le salut des hommes ; viens à mon amour, oui, viens.


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