1er dimanche de carême, année B

Gn 9.8-15
Ps 24.4-14
1Pi 3.18-22
Mc 1.12-15

Le Carême vient tout juste de commencer. Nous nous sommes avancés le mercredi pour recevoir les cendres. Le vendredi nous étions nombreux à la prière du Chemin de Croix. Nous sommes conscients qu’il nous faut progresser dans la connaissance de Jésus Christ, telle qu’était la prière d’ouverture de notre célébration.

Marc, dans le texte de l’évangile d’aujourd’hui, nous présente le Christ comme un lutteur. Il nous rappelle que Jésus passe des épreuves. Plus explicitement, Jean nous fera participer aux sentiments qui suscitent en Lui cette lutte. “Mon âme est troublée, et que dirai-je ? Père, sauve-moi de cette heure ? Mais ce précisément pour cette heure que je suis venu. Père glorifie ton nom” Voilà quelqu’un qui ne cède pas ni au désarroi ni s’enfui devant l’avenir obscur. Marc l’a rappelé d’une autre façon : après l’arrestation de Jean Baptiste, Jésus partit pour proclamer la Bonne Nouvelle de Dieu. Est-ce qu’il pouvait s’attendre à une autre chose que ce qui s’est-il passé ?

Laissez-moi vous exposer un sentiment que j’éprouve souvent pour Carême : occupés comme nous sommes à nos pratiques pieuses nous oublions de nous rendre conscients de Jésus Christ. Serait-il si craintif ou peureux ou pusillanime comme quelques pages des dévotionnels dissent ? La bonne nouvelle qu’il proclamait serait-elle si fade, avec si peu de mordant que nos paroles sur l’évangile ?

Bien sûr votre réponse et la mienne sont non, pas du tout. Mais alors à quoi tient la distance entre son audace et notre lâcheté ? Ne serait-il que nous nous contentons de certaines pratiques pieuses ? J’en fais un petit résumé : quelques-uns d’entre nous abstiennent d’alcool, autres de télévision ou de cigarettes, d’autres encore font un effort d’épargne pour donner à ceux qui ont plus besoin, ou d’autres donnent plus de temps à la prière quotidienne. Ce n’est pas mal ; c’est même plutôt bien ! toutefois où est l’évangile là dedans ? où est la liberté de Jésus qui dit aux disciples de Jean, en deuil, que les siens ne jeûneront tant que la présence de lui-même, l’époux, est là ? où est cette liberté qui dit à la Samaritaine que l’endroit où adorons Dieu n’importe peu, à Jérusalem ou ailleurs, mais que ce qui importe c’est de l’adorer en esprit et dans la vérité de nos vies ? où est cette liberté qui lui permet s’asseoir à la table des publicains et des pécheurs ?

Connaître Jésus Christ, le crucifié mais aussi celui qui est pleinement avec le Père et qui ne nous purifie pas des souillures extérieures mais nous engage envers Dieu avec une conscience droite. Progresser dans la connaissance de Jésus Christ, comment le faire sans lire et relire mille fois les évangiles ? comment le faire sans contempler ses gestes hardis et ces gestes de miséricorde, toujours près des déracinés, des pécheurs et pécheresses, des enfants, du petit peuple, des disciples qui le suivent sans trop savoir ?

Parfois dans les groupes chrétiens nous nous lamentons du petit nombre que nous sommes. Et souvent, en un geste presque inconscient, nous chargeons sur les autres chrétiens le poids de ce que nous vivons comme une défaite. Désormais, est-il possible que pour nous la présence de Jésus Christ soit plus visible ? Où en est-il de notre audace, de notre détermination, de notre énergie ?

En vous parlant ainsi, mes frères, je ne voudrais pas ressembler à un général qui incite et encourage ses troupes à la lutte. C’est vrai, de lutte il y en a. Et cette lutte est décisive. Il faut choisir entre la vie et la mort, ainsi disait une lecture de mercredi des cendres. Et c’est vrai que parfois nous ressemblons plutôt à des moribonds. Mais nous sommes du coté de la vie, de la vie de Dieu qui nous arrive chaque jour pour que nous la déployions, pour qu’elle s’épanouisse en nous et en les autres. Nous luttons pour la vie contre ceux qui tuent de mille formes, parfois avec des violences bien visibles mais aussi par des astuces perverses.

Jean l’a dit dans une lettre bien clairement : ce qui est né de Dieu est vainqueur du monde mauvais, et la victoire qui a vaincu le monde c’est notre foi.

C’est en vous, c’est en moi, où il faut puiser, car la foi est au fond de nos cœurs et elle se lève chaque matin pour le travail d’accomplissement de ce qui manque encore à la croix du Christ. Il ne faut pas vous sous-estimer, il ne faut pas vivre comme si Pâques n’arrivait jamais.

Aujourd’hui, en cette eucharistie, nous puiserons à la source même du salut. Communier au Christ n’est-ce pas le reconnaître quand il nous dit : va en paix et ne pèche plus ! Alors, mes frères, que le Dieu de toute espérance vous donne une connaissance approfondie de Jésus le Christ, celui qui confronté au mal n’a pas cédé mais l’a vaincu par un amour toujours plus exigeant et plus tendre.


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