29ème dimanche du temps ordinaire, année B

Is 53.10-11
Ps 32(33).4-5,18-22
Hé 4.14-16
Mc 10.35-45

Le grand prêtre juif sacrifiait des animaux, il expulsait de la ville le bouc émissaire le Jour du Pardon, mais il ne se sacrifiait pas lui-même ni ne se chargeait des pêchés du peuple.

Les chefs de nations font sentir leur pouvoir, et ils sont capables d’octroyer des bienfaits à leurs sujets, mais ils sont capables d’organiser une guerre pour leurs intérêts et il disent rarement toute la vérité à leurs sujets.

Le pouvoir aime être sacré et les gens du sacré aiment souvent le pouvoir. Mais voilà, la conviction chrétienne exprimée par le Jésus de Marc : le Fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir, et donner sa vie en rançon pour la multitude.

Notre mémoire collective nous le rappelle à chaque eucharistie : voici la nouvelle alliance en mon sang versé pour vous et pour la multitude en rémission des péchés.

On a tellement parlé du péché individuel, même de celui qui n’affecte pas la personne comme si nous étions des anciens juifs qui devaient se purifier après avoir touché un mort, de la même manière que la femme devait se purifier après avoir eu son bébé, que les grands dérèglements qui affectent des milliers ou milliards d’êtres humains n’affectent pas notre conscience, peut être oui nos sentiments. Nous avons perdu le sens du péché, dans le sens que nous oublions facilement les grandes injustices, ou les grands malheurs de notre terre. Ils sont là et nous les acceptons avec cette fatalité qui est aux antipodes de l’espérance chrétienne.

Alors comme le péché reste bien loin de nos perspectives, à quoi bon que quelqu’un donne sa vie pour la rémission des péchés ? Est-ce que la mort de Jésus est le ticket de notre entrée dans le ciel comme si nous avions besoin d’un billet ou, si vous voulez, d’un ticket modérateur pour obtenir le salut qui nous manque ? Est-ce que la mort de Jésus n’est pas l’aiguillon pour corriger l’orientation de notre monde et pour faire de lui un lieu bon pour la réalisation du royaume de Dieu ? Est-ce que sa mort injuste ne soulève-t-elle pas l’Esprit dans notre esprit pour travailler à ce monde nouveau où les hommes vivront comme des frères et la paix sera son enseigne ?

Voilà les enjeux des lectures d’aujourd’hui. On ne peut pas dire plus en si peu de paroles. Êtes-vous pour le pouvoir ? Faîtes attention. En soi, il n’est pas mauvais comme il n’y a pas de mauvais dans la création, toutefois la tentation de leur usage à notre intérêt est grande. Peut-on résister ?. Êtes-vous pour le sacré ? Faîtes attention. En soi, il n’est pas mauvais comme il n’y a pas de mauvais dans la création, toutefois combien est facile de s’emparer d’une soi-disant sainteté quand on vous investit du sacré ? L’homme, cette bête angélique au dire de Pascal, est capable de tout pervertir, alors quand il est placé en haut, la perversion devient insultante.

Le conseil de nos textes d’aujourd’hui est précisément le contraire. Celui qui veut être le premier sera l’esclave de tous. La sagesse de Jésus va à la racine même de la malformation de notre désir pour le soigner avec une cure amère mais combien efficace !

Vous me direz avec raison : docteur ! soignez-vous, soignez-vous vous-même. Vous connaissez la distance entre le dire et le faire. Résonne en moi l’expression endolorie des disciples : Seigneur, alors qui pourra être sauvé ?

Mais personne ne dit que nous, chacun de nous, peut guérir ses plaies. Le souvenir de la communauté chrétienne est tout autre : c’est dans ses plaies que nous avons été guéris. De la contemplation des blessures du Christ dans la croix qui lui refait les forces, qui lui redonne l’espérance. Serions-nous incapables de cesser de nous regarder un instant pour travailler pour le bien de tous ? Serions-nous incapables de jeter notre sac de péchés pour, avec un esprit refait, continuer à créer les conditions de la venue du royaume ? Serions-nous incapables de nous avancer avec pleine assurance vers le Dieu tout-puissant qui fait grâce, comme propose la lettre aux hébreux, à fin d’obtenir miséricorde et la partager avec tous ceux qui nous entourent ?

Rentrons au mystère de cet amour livré pour nous. Avec la prière de toute l’Église sentons la compagnie des hommes et femmes de toute condition, de toute race et nation, de tout âge et de tout temps ; ils ont été là comme nous y sommes aujourd’hui. Ils sont encore là, au milieu de ce monde, déboussolés et terrifiés par l’injustice et le malheur, comme nous le sommes aussi. Ils regardent les yeux fixés au Sauveur de nos personnes. Et, comme eux, nous sentons son appel : viens, suis-moi. Lui nous appelle et nous donne la grâce de pouvoir le suivre.


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