22ème dimanche du temps ordinaire, année A

Jr 20.7-9
Ps 62.2-12
Rm 12.1-2
Mt 16.21-27

Nous venons d’entendre un texte plein de sagesse. Quel avantage en effet un homme aura-t-il à gagner le monde entier, s’il le paye de sa vie ? Voilà ce que Pierre, l’homme de foi, entend.  Pour Jésus abandonner cette sagesse c’est mettre un obstacle sur la route de la recherche de Dieu. Il le fait bien sentir à Pierre qu’il nomme Satan, c’est-à-dire l’Ennemi de l’homme.

Dans notre vie spirituelle il y a eu d’abord un moment de séduction. Si cette vie est vraie, si elle est personnelle, si elle n’est point fruit des habitudes d’enfance acquises sans rien remettre en question, notre vie de foi commence toujours par une séduction. C’est l’expérience du prophète, des saints et aussi la nôtre : Seigneur, tu as voulu me séduire, et je me suis laissé séduire; tu m’as fait subir ta puissance, et tu l’as emporté.

Saint Augustin était sûr d’avoir bien écouté la prédication de Saint Ambroise%fine%; il avait senti près de lui les larmes de sa mère ; il avait réfléchi longuement..., une nuit en contemplant les étoiles dans le ciel son âme se sentit bouleversée, et il s’est laissé séduire.

Joseph Calasanz était prêtre depuis quarante ans ; il avait eu des contacts avec des réformateurs de la vie catholique à Rome. Un jour, en regardant dans une rue du Transtevere romain des enfants se bagarrer son âme se senti bouleversée, et il s’est laissé séduire.

Frère Roger avait grandi sans foi au sein sa propre famille ; il a vécu ensuite des années sans un but bien fixé. Puis en aidant les juifs qui échappaient de la barbarie de la Gestapo, son âme se senti bouleversée, et il s’est laissé séduire.

C’est peut-être aussi l’histoire de chacun d’entre nous. Nous avons été bouleversés et nous sommes laissés séduire.

Cependant un autre jour, peut-être tardivement, nous nous sommes sentis en butte à la raillerie. Pour Augustin, devenu évêque, l’empire romain s’est écroulé et il sentait bien la moquerie des païens qui lui disaient : voilà, l’empire s’est converti au christianisme et en voici le résultat !. À Joseph de Calasanz, alors âgé de quatre-vingt-dix ans, la même papauté qui avait applaudit la création de ses écoles, les supprime et avec elles supprime l’ordre religieux qu’il avait fondé. Pour Frère Roger, une vie dédiée à l’unité de l’Église et aux jeunes, n’a pas vu l’unité se faire ni se rapprocher de l’Église la majorité des jeunes. Chacun de nous sait de quoi je parle.

Que faire alors ?

Pierre s’accroche à ce que rien ne passe. Il dit à Jésus, que Dieu t’en garde. Nous nous réfugions parfois dans les prières, dans les cierges, dans l’assistance à la messe, dans le chapelet, dans un carême bien fait, et beaucoup d’autres pratiques. Nous nous accrochons pour que rien ne change en nous, même si nous subissons beaucoup de changements autour de nous. Nos pratiques, au lieu d’être des formes gratuites de joie, deviennent des murailles pour tout garder. Nous oublions la recommandation de Paul : transformez-vous en renouvelant votre façon de penser pour savoir reconnaître quelle est la volonté de Dieu. Il nous dit : l’adoration véritable c’est d’offrir à Dieu notre personne et notre vie. Nous devrions déjà le savoir : en la prenant, Dieu nous la retourne pleine de sa propre vie divine, pleine de joie, de bonté, de tendresse.

Alors, frères et sœurs, n’ayons pas peur. Un feu dévorant nous prend au plus profond de nous-mêmes. C’est l’invisible qui vient à nous. Il nous donne une nouvelle liberté, celle de la confiance du cœur, celle qui a permis à Augustin d’écrire des pages inoubliables pour l’édification de l’Église, celle qui a permis à Joseph Calasanz d’espérer contre toute espérance, celle qui a permis à Frère Roger de devenir une icône de la tendresse de Dieu. Oui, le moment est venu de vivre de la confiance. Notre cœur est convaincu que les moqueries des impies n’ont pas le dernier mot sur la vie et sur l’histoire. Notre cœur sait que tout, tout, finira bien. À nous seulement d’attendre activement en faisant ce qui est bon, ce qui est capable de plaire Dieu, et en priant comme l’a fait notre communauté au commencement de la messe : Dieu puissant de qui vient tout don parfait, enracine en nos cœurs l’amour de ton nom; resserre nos liens avec toi pour développer ce qui est bon en nous et veille sur nous avec sollicitude pour protéger ce que tu as fait grandir.

Quel avantage en effet un homme aura-t-il à gagner le monde entier, s’il le paye de sa vie ? Aucun, Seigneur, nous répondons. Alors Jésus, s’adressant aux Douze, dit : et vous, ne voulez-vous pas partir  Mais Pierre, l’homme de foi, répond  : Seigneur, à qui irions-nous ? Tu as des paroles de vie éternelle.


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